Aire d'adhésion à la charte du Parc
Aire maritime adjacente
Ecologie/Développement durable
Auteurs : Marion PEIRACHE, Alain BARCELO, Annie ABOUCAYA, Magalie ALAPHILIPPE, Franck ALARY, Violaine ARNAUD, Sophie ARNAUD-HAOND, Guillelme ASTRUC, Giulia AZZOLINI, Rémi BEAU, Francine BOILLOT-GRENON, Laurence BONNAMY, Charles-François BOUDOURESQUE, Anne CADORET, Pierre CHEVALDONNÉ, Marie CLAP, Cyril COTTAZ, Elodie DEBIZE, Marc DUNCOMBE, Daniel FAGET, Marie-Claire GOMEZ, Christine GRAILLET, Patrick GRILLAS, Lysa LAVIOLLE, Sylvia LOCHON-MENSEAU, Gilles J. MARTIN, Frédéric MEDAIL, Hélène MELIN-CRAPET, Stéphane PENVERNE, David PONCIN, Jean-Marc PRIEUR, Éric SERANTONI, Fabienne TANCHOT, Isabelle TAUPIER-LETAGE, Magalie VEYRAT, François VICTOR.
La stratégie scientifique du Parc national de Port-Cros (PNPC), espace
protégé terrestre et marin situé en Provence (France, Méditerranée), est un document
cadre permettant de disposer d’une définition des besoins dans le domaine scientifique
au sein du PNPC, et de retenir les axes prioritaires d’action pour l'ensemble des
disciplines scientifiques (biologie, écologie, économie, droit, géographie, histoire,
sociologie, etc.) durant la période 2023-2032, dans le cadre d’une vision à long terme.
Elle déborde largement de la simple définition du programme des actions scientifiques
du PNPC puisqu’elle intègre l'ensemble de la chaîne de production de la connaissance,
depuis sa genèse jusqu'à sa diffusion.
La nécessité d'une stratégie scientifique se déduit des textes fondateurs des
parcs nationaux français : le code de l'environnement, le décret de création du Parc
national et l'arrêté du 23 février 2007 « arrêtant les principes fondamentaux applicables
à l’ensemble des parcs nationaux ». Ainsi, l’article 3 de l’arrêté dispose que : « le coeur
du parc national constitue un espace de protection et de référence scientifique, d’enjeu
national et international, permettant de suivre l’évolution des successions naturelles,
dans le cadre notamment du suivi de la diversité biologique et du changement
climatique ».
La première stratégie scientifique du PNPC avait été actée en 2013, puis modifiée
en 2017 à la suite de l’évolution du périmètre du PNPC et de la validation de sa charte.
Après évaluation de la précédente, la méthode qui a présidé à l’élaboration de
cette stratégie a été très participative. Une consultation et des échanges continus ont
permis d’aboutir à la coécriture de certains passages avec des membres du Conseil
scientifique (CS) et les services du PNPC, ce qui a permis d’exprimer davantage les
besoins en termes de gestion. Le document définit la stratégie scientifique 2023-2032
portée par le PNPC sur ses coeurs (archipels de Port-Cros et Porquerolles), l'Aire
maritime adjacente et l'Aire d'adhésion constituée d'une partie du territoire des
communes de La Garde, Le Pradet, Hyères, La Croix-Valmer et Ramatuelle. Pour
autant, les préconisations scientifiques sont cohérentes et potentiellement applicables
sur l’ensemble de l’Aire optimale d’adhésion (Aire d’adhésion + territoires de Parc
national inclus dans des communes ayant choisi de ne pas adhérer).
La nouvelle stratégie scientifique est composée de trois parties principales :
- la première traite de la vision et se focalise sur les enjeux principaux
(le changement global et l’accompagnement au changement), les principes
qui régissent la réflexion scientifique et la gestion, et les objectifs à
atteindre ;
- la deuxième porte sur la déclinaison opérationnelle, traitant en
premier lieu des moyens et de la méthode avant de focaliser tour à tour sur
la connaissance puis la gestion pour l’approche écosystémique et
l’acceptation accrue de la transition écologique ;
- la troisième aborde le partage des connaissances, les pratiques du
PNPC et la clef du changement, en explorant les bases de données, les
réseaux professionnels, la communication et les sciences citoyennes.
Dans la stratégie scientifique, l’humain, un vivant parmi les autres vivants, est
pleinement intégré à l’écosystème (le terme « socio-écosystème » n’est donc
volontairement plus utilisé) ; sa place y est envisagée, comme pour les autres espèces,
à travers ses fonctions de prédateur, de perturbateur, mais aussi de destinataire
d’informations et de services venant des autres vivants, de gestionnaire, de protecteur,
de passeur de savoir, etc. : l’approche écosystémique est un guide pour l’ensemble
du document.
L’éthique « évocentrée » est retenue : tout y est envisagé au prisme du maintien
des fonctionnalités écologiques et des dynamiques évolutives. Il s’agit d’aborder les
questions qui se posent en n’oubliant jamais que, tant du fait des changements globaux
majeurs que du fait des relations qu’elles tissent entre elles et des processus qui les unissent ou les font interagir, toutes les espèces - l’humain y est compris - participent
aux lois de l’évolution.
L’objectif scientifique du PNPC est de comprendre ces lois, d’en identifier les
manifestations concrètes et de veiller à en garantir le fonctionnement.
L’occupation humaine façonne les paysages depuis des milliers d’années, et
rares sont les écosystèmes ayant évolué de façon peu contrainte sur une longue
période. Le PNPC tend à devenir un espace de référence pour l’expression de
dynamiques évolutives moins influencées par les humains. Ces lieux rares sont
exceptionnels et spécifiques puisqu’ils sont les seuls endroits où, par exemple, des
processus peuvent développer pleinement les phases de vieillissement, de mort et de
dégradation de la végétation. Dans la logique de devenir un laboratoire grandeur
nature, le PNPC possède avec ses réserves intégrales des espaces soustraits aux
impacts anthropiques directs, et met la priorité sur ces espaces où les processus et
dynamiques de la biodiversité peuvent s'exprimer et informer de la dynamique des
milieux peu impactés par les humains. La mise en place de tels espaces participe aussi
à la solidarité écologique en laissant une place à l’expression des autres composantes
de l’écosystème au sein du territoire et en contribuant aux réseaux écologiques.
Un volet de la recherche menée au PNPC est défini pour répondre aux questions
de gestion. Ceci a engendré un dialogue avec les agents du PNPC pour établir une liste
de thématiques de gestion sur lesquelles des questionnements de recherche sont, ou
devront être, formulés. Des thématiques communes à tous les Parcs nationaux
français, comme la gestion forestière ou les énergies renouvelables, font ou feront
l’objet de discussions au sein de groupes de travail de la commission scientifique des
Parcs nationaux français. Dans le contexte d’un parc national péri-urbain, les choix
d’interventions plus ou moins marqués sont à réfléchir au regard de la responsabilité
morale et patrimoniale du PNPC pour des habitats et espèces menacés au niveau local,
national, voire international, mais aussi du caractère irremplaçable des éléments à forts
enjeux de conservation. La programmation et la mise en oeuvre des actions de gestion
ainsi décidées commencent par la formulation d’un diagnostic en amont, pour
déterminer les sites d’intervention prioritaire, puis fixer ou adapter les mesures ou
modalités de la gestion au contexte local, et enfin évaluer la pertinence et l’efficacité
des mesures mises en oeuvre (ou leurs effets induits) afin, selon le cas, de les
poursuivre, les réorienter, ou les arrêter (gestion adaptative, retours d’expérience). La
gestion adaptative se doit également de mieux intégrer les préconisations issues des
sciences humaines et sociales, et d’interroger le rapport que peuvent avoir les humains
avec les autres vivants, et de s’en inspirer pour communiquer et sensibiliser les usagers
aux patrimoines locaux. Le PNPC veillera à (i) sensibiliser les acteurs naturalistes à
l’importance de prendre en compte les sciences humaines et sociales, (ii) favoriser le
partage de connaissances scientifiques acquises et les échanges entre les acteurs,
notamment entre chercheurs et gestionnaires, (iii) partager sur les freins (scientifiques,
techniques, financiers, éthiques, etc.) et (iv) identifier les meilleurs moyens de
communiquer auprès du grand public sur la gestion des écosystèmes.
Auteurs | PEIRACHE et al. |
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Éditeur | Parc national de Port-Cros |
Nombre de pages | 83 |
Référence | Scientific Reports of Port-Cros National Park, 37: 335-417 (2023) |