Partager

Exploitation des ressources halieutiques par la pêche artisanale dans et autour des aires marines protégées : socio-écosystème, conservation et gouvernance.

sci_resumes_3.png
Sites
Mer
Thème
Faune marine

Résumé. En Méditerranée, la pêche artisanale souffre de la diminution de la ressource, en
raison de sa surexploitation. Il en résulte une diminution spectaculaire du nombre de bateaux
et une diversification des ‘métiers’. Le métier est la combinaison des espèces ciblées, des
engins utilisés et de la période de l’année.
Les Aires Marines Protégées (AMPs) constituent non seulement un outil de protection du
patrimoine naturel, mais aussi un outil au service de la pêche artisanale, grâce à ‘l’effet
réserve’ : reconstitution des stocks d’espèces-cibles, exportation d’oeufs et de larves et
exportation d’adultes (spillover) vers les zones périphériques.
Il existe deux types d’AMPs : celles où toute forme de pêche est prohibée (No-Take Zones ;
NTZs) et celles où la pêche artisanale est autorisée, mais fortement encadrée par des restrictions
qui la rendent durable et compatible avec la protection du patrimoine naturel (Multi-Use
Management ; MUM). Par ailleurs, la gestion MUM, dans laquelle la pêche artisanale contrôlée
remplace les top-predators (prédateurs au sommet de la chaîne alimentaire) disparus, peut
permettre aux écosystèmes d’être plus proches de l’état naturel que la gestion NTZ. De
plus, la gestion MUM assume clairement le fait qu’il n’existe pas d’écosystèmes réellement
naturels, mais plutôt des socio-écosystèmes, dont l’homme fait partie.
Le Parc national de Port-Cros a choisi la gestion MUM ; la pêche artisanale y est strictement
régulée par la charte de la pêche ; dans ces conditions, elle est compatible avec la protection
des espèces et des écosystèmes, tout en assurant aux pêcheurs un niveau de captures qui
rend leur activité économiquement rentable. La réserve naturelle de Scandula (Parc naturel
de Corse ; Parcu di Corsica), avec une gestion de type NTZ (réserve intégrale et zone tampon
où seule la pêche artisanale est autorisée, bien que sans restrictions particulières), débouche
sur des résultats similaires. Les AMPs (Port-Cros et Scandula en particulier) constituent
de remarquables laboratoires de terrain, permettant d’expérimenter et de confronter les
méthodes de gestion.
À l’épreuve de la cogestion, il existe une sorte de triangle ‘pêcheur-gestionnaire-scientifique’.
Dans la plupart des AMPs de Méditerranée, le partenariat est actuellement plus resserré
entre gestionnaires, pêcheurs et scientifiques, au bénéfice à la fois des écosystèmes et de
la ressource qu’ils produisent.
Parmi les conclusions et messages qui émergent de deux-trois décennies de suivi des espèces,
des populations, des ressources et de la pêche dans les AMPs de Port-Cros et de Scandula,
il en est trois qui méritent plus particulièrement d’être soulignés. (i) L’approche espèce par
espèce, issue d’une mauvaise interprétation de la Directive Habitats de 1992, n’est plus
tenable. L’avenir appartient à une approche intégrative, écosystémique ; cette approche n’est
ni difficile, ni théorique ; elle est non seulement plus efficace, mais aussi moins couteuse, que
l’approche espèce par espèce. (ii) La gestion de type MUM, basée sur la sectorisation des
usages et sur une optimisation des contraintes aux activités humaines (dont la pêche de loisir
et la pêche artisanale), débouche sur la coexistence entre protection efficace du patrimoine
naturel et des captures remarquables pour la pêche artisanale, à condition d’être assistée par
un suivi permanent de l’effort de pêche et des captures. (iii) Tous les écosystèmes marins
sont en fait des socio-écosystèmes, dont l’homme fait partie, avec la pêche artisanale ;
sa présence peut même les rendre plus ‘naturels’ qu’en son absence, tout au moins en
Méditerranée. La cogestion par le triangle pêcheur-gestionnaire-scientifique n’apparaît donc
pas comme un pis-aller, en l’absence d’une exclusion de l’homme, mais comme le pilier de
l’approche écosystémique de la gestion et de la protection de l’environnement. Le maintien
des socio-écosystèmes ne constitue pas non-plus un pis-aller, mais un objectif qui peut être
affiché avec fierté.

Ce chapitre d’ouvrage ne comportait pas de résumé. Le présent résumé a été rédigé
par l’un des co-auteurs, Charles-François Boudouresque.

Auteurs LE DIRÉACH L., BOUDOURESQUE C.F., BONHOMME P., CADIOU G., OURGAUD M., ROUANET É.
Éditeur Parc national de Port-Cros
Nombre de pages 2
Référence Sci. Rep. Port-Cros Natl. Park, 33: 233-235 (2019)
Documents téléchargeables