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La rubrique "Le dossier" propose différents éclairages sur une thématique d’actualité, enrichis en paroles d’experts, de partenaires et de scientifiques sous forme d’interviews…
Retrouvez plus bas tous les bonus de la rubrique.

Sophie-Dorothée Duron : " Je crois aux partenariats et aux actions concrètes... "

Entretien avec la nouvelle directrice du Parc national 

Précédemment cheffe du service Espaces Maritimes Littoraux à la direction générale des affaires maritimes (Secrétariat d’État chargé de la Mer - Paris), Sophie-Dorothée Duron a pris la direction du Parc national de Port-Cros le 1er juillet.

 

Le territoire du Parc national de Port-Cros vous est-il familier ?

Je suis née près de la Rochelle, mais suis arrivée à Marseille à 7 ans. Ma mère, qui était scientifique, travaillait avec des chercheurs de Port-Cros. J’y suis donc venue enfant et j’ai continué adulte ayant des attaches familiales varoises. J’ai d’ailleurs commencé ma carrière à La Garde au CrossMed, avant de rejoindre la Corse, puis la Polynésie française, particulièrement aux Marquises. Je suis une fille du littoral, je n’ai vécu et travaillé que sur le littoral et dans les îles. Quant à mes années de ministère, je dis toujours qu’elles étaient… en Île de France.

C’est ce qui a motivé votre candidature  ?

Le Parc national de Port-Cros est vraiment le territoire sur lequel j’avais envie de m’investir. Parce qu’il concentre tout ce qui m’anime. C’est un territoire littoral et insulaire extraordinaire avec un patrimoine naturel, culturel, humain, et c’est l’occasion de travailler dans une région où j’ai grandi. L’autre raison, c’est que les parcs nationaux sont des outils territoriaux exemplaires pour construire un vrai développement durable. Ce sont en fait des contrats et je crois aux partenariats public-privés pour réussir la transition écologique et démontrer que c’est possible. C’est ce qu’incarnent les 60 ans de Port-Cros. Pour moi, il n’y a pas de politique publique réussie sans ces dynamiques construites entre élus, État et partenaires privés. C’est selon ces méthodes que je m'implique depuis plus de 20 ans, au niveau national ou territorial. Et dans le contexte actuel du changement climatique, d’incertitudes, mettre au centre du débat l’humain et la qualité de l’environnement, c’est essentiel. C’est une chance de pouvoir travailler à construire des solutions d’avenir pour notre territoire et rayonner au-delà.

La nouvelle stratégie scientifique du Parc national et son approche évocentrée vous parlent donc ?

Ce document est remarquable et je ne peux que féliciter les personnes qui l’ont élaboré. C’est un document scientifique, il est cependant accessible, court et d’une grande clarté. Il explique vraiment la philosophie de cette approche évocentrée qui met l’homme, la nature et leurs interactions au centre, en prenant en compte les changements à venir. Elle incarne le choix initial de gestion de Port-Cros, de protéger un patrimoine naturel avec l’humain, pas contre lui. Et cette stratégie ne fait pas que donner une vision, elle analyse aussi les moyens d’y parvenir. L’objectif est de tester des solutions pour voir comment accompagner ce territoire afin qu’il soit le plus résilient, le plus résistant possible dans les grandes mutations qui vont s’opérer.

Je trouve ce travail d’autant plus remarquable que l’approche intègre la dimension sciences naturelles, mais aussi sciences humaines. Elle est extrêmement complète.

S.D Duron©K. Audemard.jpg
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Quel regard portez-vous sur les stratégies nationales qui donnent des feuilles de route aux aires protégées ?

Dans mes postes précédents, j’ai coordonné l’élaboration de trois stratégies : la Stratégie nationale pour les aires protégées 2030, la Stratégie nationale pour la biodiversité 2030 et la Stratégie nationale mer et littoral 2030. J’ai ainsi une vision claire des trois. Elles sont différentes mais cohérentes. Elles s’imbriquent ; ces trois stratégies posent la même question : comment arrive-t-on à protéger notre environnement afin de résister dans le temps pour se développer, mais aussi pour bien vivre, voire s'émerveiller ?

 Mais comment parvient-on, dans le même temps, à permettre le développement économique d'une part, son acceptabilité sociale et la protection environnementale, d'autre part ? C'est tout le défi du développement durable. C’est-à-dire accompagner les activités agricoles, forestières, touristiques, car on ne peut pas mettre la France sous cloche ; et arriver à protéger la fonctionnalité des écosystèmes pour que la Nature perdure en elle-même et nombre de services qu'elle nous offre.

En particulier ici, qui est un territoire très attractif.

C’est le défi commun à ces trois stratégies qui chacune vont essayer de trouver des solutions dans les domaines qu’elles ciblent : biodiversité, mer et littoral, aires protégées.

Pour y parvenir ces trois stratégies considèrent qu'il faut s'appuyer sur des territoires pilotes d'exception. C'est ce que sont les aires protégées et parmi elles en particulier, les parcs nationaux.  Elles font le pari que ces sites, comme Port-Cros, aident à trouver des solutions pertinentes pour les territoires qui les abritent, et permettent d’inspirer d’autres espaces en matière de développement durable.

C’est le principal défi ici : arriver à protéger richesse environnementale et patrimoniale pour résister dans le temps, en permettant les activités humaines et la présence du public.

Dans quel état d’esprit abordez-vous cette nouvelle mission ?

Avec énormément d’enthousiasme. Je suis prête à travailler avec tous les acteurs du territoire, aux côtés de la présidente du conseil d'administration et de ses membres, avec les élus, les scientifiques et, bien sûr, les agents. J’aurai à cœur d’écouter, de développer avec eux des projets dans le cadre de la charte. Je suis très attachée aux projets concrets, utiles pour les territoires ; je suis dans cet esprit de co-construction et de dialogue, pour proposer des solutions.

E.P.

cp_sophie_dorothee_duron.pdf (format PDF / 190.86kB)

 

Atelier MedPAN  : quel Tourisme dans les Aires Marines Protégées ?

Le réseau MedPAN

 

Le Parc national des Calanques

 

L'AMP d'Al Hoceima au Maroc

Stratégie de Communication dans les Aires Protégées du Maroc : Cas de l’AMP d’Al Hoceima
« L’écotourisme au Maroc représente une petite niche de clientèle qui tarde à se développer. La stratégie de communication et de promotion de l'écotourisme dans les aires protégées (2020) ambitionne de capter un million d'écotouristes à l’horizon 2030. Elle implique les parties prenantes et s'appuie sur la création de la marque « Parcs nationaux » qui est un chantier clé de cette stratégie pour décliner les standards de tourisme responsable, labelliser les produits et les activités et communiquer sur l’offre écotouristique.
À l’heure du numérique, les canaux de communication classiques utilisés gagneraient à s'ouvrir sur le digital. En effet, l'étude de cas de l’AMP d’Al Hoceima visant à comprendre pourquoi une AMP aussi prometteuse ne bénéficie pas de la visibilité qui lui convient, a permis de défricher les voies à suivre. L'analyse des résultats des enquêtes et entretiens
réalisés en 2022 et en 2018 montrent que 73 % des personnes ayant répondu ne connaissaient pas l’AMP et 7 personnes sur 10 de la clientèle internationale ne connaissaient pas la ville d’Al Hoceima. La motivation première des visiteurs de l’AMP est la nature (86%) suivi des plages sauvages et plongées (71%), les paysages (53%), et la découverte de la culture (48%). Le choix de la destination est influencé par le digital ; les réservations des visites guidées se font surtout par Instagram, aucune agence touristique ne propose d’en faire, mais l’AMP a gagné en visibilité grâce à des influenceurs. En outre, les jeunes des générations Y et Z préfèrent les Réseaux sociaux, alors que les moins jeunes trouvent que les supports papiers sont encore crédibles, et que leurs contenus est une sorte de promesse de la part de l’AMP.
Pour que l’AMP d’Al Hoceima devienne une niche de tourisme durable, des approches intégrées promotionnelles et communicationnelles innovantes sont explorées aboutissant à des actions opérationnelles : l’AMP crée son cluster
écotouristique, dispose de sa propre stratégie digitale percutante, où L’accent est mis sur sa promotion on-line (site internet, Instagram, Facebook, influenceursvoyage, youtubeurs...) et off-line (infrastructure d’accueil et d'information,
panneaux d’affichage, partenariat. »
Extrait de la présentation de Mustapha MARRAHA du Groupe d'étude et de Protection des Mammifères du Maroc. Intervenant lors de l’atelier MedPAN 2024.

Le Parc national de Port-Cros

 

Introduction Plénière D'ouverture des Ateliers

 

Entretien avec Renaud Dupuy de la Grandrive, directeur de l'AMP de la Côte agathoise

 

Mouvement de fond... 2024, une année charnière

Le parcours de Marc Duncombe, Directeur sortant du Parc national

« Le fil conducteur de ma carrière a été l’environnement littoral. Ingénieur agronome de formation, mon premier job a été l’animation de la Loi littoral (1986) sur le littoral normand. Il y avait la nouvelle loi, il fallait convaincre les opérateurs de l’État et les collectivités que l’on ne pouvait plus tout aménager, que le littoral était une ressource non renouvelable à préserver au bénéfice de l’intérêt général et du futur. Mon deuxième poste a été chef de service à la DDA (Direction départementale de l’Agriculture) dans le Cotentin où je me suis beaucoup occupé d’environnement, mais aussi d’aménagement foncier dans les communes rurales : "aménager en ménageant le bocage". Ensuite j’ai fait de la coopération sur les petites îles dans l’Océan indien (ministère de la Coopération). J’y ai passé trois ans, travaillé à la mise en place d’une législation sur les études d’impact et produit un atlas des zones d’environnement sensibles. C’était passionnant, et, longtemps après, j’ai eu la satisfaction de savoir que ce travail avait été utile. Les petites îles ce sont des territoires idylliques, mais c’est là où il y a le plus de fragilité environnementale. Puis j’ai intégré le prestigieux Conservatoire du littoral, d’abord pour mettre en place les programmes dans les différentes régions de l’Outre-mer, puis en tant que directeur du foncier au siège de Rochefort. J’y suis resté 20 ans, dont 17 ans sur les Outre-mer mais basé en métropole.

Je couvrais La Réunion, Mayotte, la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin, Saint-Barth... La Guyane française, Saint-Pierre et Miquelon et j’avais aussi des missions sur la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie. Autant de contextes insulaires et fonciers très diversifiés au sein desquels nous nous sommes attachés à structurer peu à peu des équipes locales qui ont poursuivi les projets.

 

Marc Duncombe ©M. Gasquy
Marc Duncombe ©M. Gasquy

 

J’ai pris mes fonctions au Parc national en juin 2017. J’ai de la chance, mon parcours complètement atypique a été passionnant. Je n’ai jamais cultivé la carrière j’ai voulu faire les choses qui m’intéressaient. Et j’ai eu la chance de pouvoir le faire. Merci à la nature si belle et si fragile de m’avoir guidé, sans oublier l’état français qui fait beaucoup pour elle, même si ça n’est jamais assez... »

E.P.

 

Le parcours de Gilles Martin, Président sortant du Conseil scientifique du Parc national de Port-Cros (2018-2024)

« Professeur de droit, j’ai été invité par Emmanuel Lopez (ancien directeur du Parc national de Port-Cros) à rejoindre le Conseil scientifique du Parc national en 1992. Très bien accueilli par les membres du Conseil et spécialement par son président, Charles-François Boudouresque, qui m’a très vite fait confiance, j’ai été appelé à présider le groupe “Sciences humaines et sociales” au cours de mon troisième mandat. Enfin, tous les collègues m’ont fait confiance en 2018 pour présider le Conseil scientifique lui-même et j’ai ainsi été le premier et le seul juriste à présider le Conseil scientifique d’un parc national en France. Cette expérience m’a énormément apporté et appris. Je suis toujours membre du Conseil scientifique et de son bureau en qualité de président honoraire et je suis fier d’avoir passé la main pour présider ce
Conseil à Isabelle Taupier-Letage le 24 avril dernier. »

E.P.

 

Le parcours de Sylvia Lochon-Menseau, Conservatrice sortante du Conservatoire botanique national méditerranéen (2011-2024)

« J’ai eu un parcours très diversifié au sein du ministère de l’Agriculture et du ministère de l’Environnement avec ma double casquette d’ingénieur écologue et agronome.
« Enseignante en lycée agricole en début de carrière, j’ai pu ensuite développer à la DRAAF (Direction régionale de l’Agriculture et de la Forêt) au service de la Protection des végétaux, une approche de culture raisonnée et développer les premières “Mesures agrienvironnementales” pour anticiper le retrait de certains herbicides, sources de pollution dans les eaux. J’ai ensuite passé une partie de ma carrière en Guyane à la DIREN (Direction régionale de l’Environnement) à travailler notamment sur la mise en place de deux grandes réserves naturelles et sur la sauvegarde des tortues marines. Il n'y avait pas encore de réglementation “Espèces végétales protégées” en Guyane, et j'ai pu aboutir à la publication de l'“Arrêté ministériel des plantes protégées” ainsi qu'à l'application de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction), ce qui a contribué à limiter la pression et le trafic d'espèces menacées.

Sylvia Lochon-Menseau©DR
Sylvia Lochon-Menseau©DR

Des Patou… aux oliviers
« De retour en métropole, j’ai pris en charge le service Environnement à la DDT (Direction départementale des Territoires) des Hautes Alpes avec notamment les dossiers loup, chasse, Natura 2000, police de l'eau. J'ai géré le retour du loup avec l'ONCFS (Office national de la chasse et de la faune sauvage) pour aider les agriculteurs à changer leur pratique de gardiennage des troupeaux et faire la promotion des chiens Patou.

« Et pour mon dernier poste avant de partir en retraite, je suis revenue à ma passion première la botanique : directrice du Conservatoire National Méditerranéen de Porquerolles, poste où je suis restée le plus longtemps, 13 ans. J'ai pu contribuer à développer les missions édictées par notre agrément ministériel : missions de connaissance et de conservation des espèces rares et menacées. Et surtout, je me suis attachée à mettre à disposition les données de répartition des espèces à travers les plateformes des SINP (Système d’information de l’inventaire du patrimoine) régionaux, car l'enjeu du porter à connaissance auprès du public et des aménageurs est capital pour mieux prendre en compte la flore patrimoniale et les habitats naturels dans les projets d'aménagements.

« L'historique du Conservatoire botanique, né à Porquerolles en 1979 au sein du Parc national de Port-Cros, avec sa première vocation de sauvegarder la biodiversité cultivée à travers les vergers conservatoires, m'a permis de valoriser les collections variétales d'oliviers comme support de travaux scientifiques et de développer des programmes avec
les organismes scientifiques sur l'adaptation des variétés face au changement climatique. »

 

Sylvia Lochon-Menseau décorée par le préfet du Var

À l’occasion d’une cérémonie de départ organisée au Castel Sainte-Claire, la directrice du Conservatoire botanique a reçu une haute distinction de l’État

La directrice du Conservatoire botanique national méditerranéen de Porquerolles qui prendra sa retraite le 1er septembre termine sa carrière au CBNMed où elle a passé treize ans. Lors de son arrivée au Conservatoire, elle avait été promue au grade de chevalier de la Légion d’honneur. En mars dernier, elle a été promue au grade d’officier dans l’ordre du Mérite agricole, une nouvelle distinction est venue récompenser le 25 juin son parcours exceptionnel au service de l‘environnement.

Remise de médaille SLM©K. Audemard
Remise de médaille SLM©K. Audemard

Lors de la cérémonie de départ organisé au Castel Sainte-Claire, siège du Parc national de Port-Cros, Sylvia Lochon-Menseau, entourée de sa famille, de ses collègues et de personnalités locales, a été promue au grade d’officier de la Légion d’honneur ; distinction qui lui a été remise par le préfet du Var Philippe Mahé. Lequel a évoqué les nombreuses actions de la récipiendaire en faveur de la flore méditerranéenne, retenant en particulier : la mise en œuvre des politiques publiques de l’État dans le cadre de l’inventaire de la flore et des habitats naturels ; la contribution au développement d’une base de données et d’une plateforme Internet régionale « Silène » - système d’information et de l’inventaire du patrimoine naturel - accessible au public, en partenariat avec les DREAL PACA et Occitanie ; le montage de programmes sur les espèces rares frontalières cofinancés par les fonds européens ; la mise en valeur des collections variétales fruitières de Porquerolles aux côtés du Parc National de Port Cros ; la conservation de près de 2000 espèces végétales au sein de la banque de graines du Conservatoire, dont certaines sont rares ou menacées ; et enfin son implication dans le programme d’adaptation de l’olivier au changement climatique avec l’Institut National de Recherche pour l’Agriculture, ou encore sur le programme de recherche des palmiers tolérants aux charançons du bourgeon terminal, en alternative à l’utilisation d’insecticides.
« Votre parcours, concluait le représentant de l’État, nous inspire et nous rappelle que la protection de notre planète est une responsabilité collective et une nécessité urgente pour un avenir durable. »

Cette cérémonie conviviale a été l’occasion pour l’ensemble des participants de découvrir des épisodes étonnants de la carrière de Sylvia Lochon-Menseau, négociatrice en milieu hostile, au milieu des chasseurs, des grands céréaliers ou en Outre-mer, qui confirment - si besoin en était - de l’engagement, de la ténacité et de la personnalité lumineuse de cette femme humble et passionnée qui laissera une empreinte durable au sein de l’établissement.

E.P.

 

Le parcours de Patrice Lardé, secrétaire général sortant du Parc national de Port-Cros

Patrice Lardé a pris ses fonctions de secrétaire général du Parc national de Port-Cros au début du mois de février 2015. Il venait de la préfecture de police où il était secrétaire général de la direction des Transports et de la Protection du public après avoir passé 25 ans au ministère de l'agriculture et de la pêche ou il a pu exercer différentes fonctions.
Il a débuté sa carrière en temps que premier greffier des services judiciaires au ministère de la justice.

 

P. Lardé ©M. Gasquy
P. Lardé ©M. Gasquy

 

Le parcours d'Isabelle Taupier-Letage, nouvelle présidente du conseil scientifique

« Mon attachement au Parc national de Port-Cros est ancien. D’une part car je suis membre du Conseil scientifique du PNPC depuis près de 20 ans. D’autre part, car j’ai eu la chance extraordinaire de pouvoir passer des vacances en pleine nature sur Porquerolles, au fort de l’Alycastre1, jusqu’à mes 17 ans (1977)2. Plus tard j’ai pu retrouver les îles avec des jobs d’été au Conservatoire botanique national méditerranéen de Porquerolles (CNBMed Porquerolles)
et comme animatrice sur Port-Cros. Avec un grand-père marin et le bonheur d’évoluer dans un tel environnement, l’idée de “faire de l’océanographie” s’était ancrée comme la solution pour allier profession (il faut bien vivre) et qualité de vie (il faut bien en profiter)3.
« J’ai donc poursuivi des études naturalistes jusqu’au DEA d’océanographie (1984) à la station marine d’Endoume. Mais au lieu de travailler sur la pression de broutage des oursins4 dans une crique de Port-Cros5 comme prévu, j’ai fait mon stage avec un océanographe physicien exilé d’un laboratoire parisien qui n’avait plus le droit d’afficher la Méditerranée à son programme scientifique, tellement la Méditerranée était ringarde6.

« Et j’ai découvert que cette mer qu’on surnomme la « Grande Bleue » n’est pas cette mer immobile et uniforme de carte postale, mais qu’elle est au contraire extrêmement dynamique et donc très variable. Pour ma thèse de doctorat d’océanologie de l’Université d’Aix-Marseille II (1988) j’ai mis en évidence, par l’imagerie satellitaire notamment, le rôle
des tourbillons qui se forment le long de l’Algérie dans le transport de l’Eau Atlantique7, ainsi que leur rôle déterminant pour la biologie (distribution du phytoplancton).

Isabelle Taupier-Letage©Charles-François Boudouresque.jpg
Isabelle Taupier-Letage©Charles-François Boudouresque.jpg

 

J’ai intégré le CNRS (1989) comme chargée de recherches dans le laboratoire qui est actuellement l’Institut Méditerranéen d’Océanologie (MIO CNRS/AMU/IRD/UTLN). J’ai poursuivi les travaux sur le réexamen des courants en Méditerranée dans la moitié sud, peu ou mal connus8, avec de nombreuses péripéties autour notamment de ce que nous avons appelé le Courant LibyoÉgyptien. Parallèlement je contribue aux études sur l’évolution à long terme des masses d’eau en Méditerranée (non seulement la variabilité des eaux formées en Méditerranée, mais aussi celle de l’eau entrante Atlantique), en lien avec le changement climatique. Enfin
j’utilise mes observations (in situ et satellitaires) pour collaborer avec les modélisateurs dans l’évaluation de la réalité de leurs simulations et de leur qualité. »

E.P.

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1 Je couchais dans les oubliettes, dans la cellule du Masque de Fer.
2 J’ai donc connu les phases de développement de Porquerolles, depuis le port avec un seul quai jusqu’à la
configuration actuelle, avec l’évolution parallèle de la fréquentation terrestre et maritime. Pour autant tout
n’était pas mieux avant : on avait toujours avec nous un flacon d’essence de térébenthine à cause du goudron
échoué sur les plages provenant des dégazages en mer.
3 J’ai réalisé depuis combien j’avais idéalisé le concept…
4 À l’époque il y avait des problèmes de surpâturage de l’oursin comestible !
5 Habiter sur Port-Cros : le Graal !
6 « On » savait déjà tout !
7 On admettait qu’il y avait plusieurs « branches » de courant, mais sans expliquer pourquoi deux particules
soumises aux mêmes lois physiques a priori pouvaient avoir des trajectoires différentes, voire contraires aux
lois physiques.
8 À l’occasion des 50 ans du PNPC une synthèse en français avec un focus sur les îles d’Hyères a été publiée dans
les Scientific Reports of the Port-Cros National Park (2013 - 27:29-52).

 

Le parcours de Pascal Truong, nouveau conservateur du Conservatoire botanique national méditerranéen de Porquerolles.

Originaire du Var et né à Toulon, Pascal Truong dont les parents étaient dans la Marine a passé une partie de son enfance en Afrique, « quatre années de 6 à 10 ans qui m’ont marqué et ont beaucoup influencé mes choix »
Au sortir du lycée agricole d’Antibes où il a suivi la filière “Sciences et techniques de l’agronomie et de l’environnement ”, il explique : « J’étais déjà très intéressé par l’environnement, mais je me cherchais et n’étais pas voué, au départ, à faire des études longues ». Il s’oriente vers un BTS aménagement paysager. « Et là, j’ai eu la chance de découvrir ma fibre autour du végétal. Ce qui m’a conduit à vouloir étudier l’agronomie et l’écologie en milieu tropical, intérêt bien sur lié à mon expérience africaine ». Il suivra le cursus de l’école supérieure en agro-développement international (ISTOM) en région parisienne qui lui donne la possibilité de partir en stage à plusieurs reprises, notamment en Afrique, avec pour mission d’utiliser le végétal comme ressource alimentaire ou économique.  « Mon dernier stage m’a permis de comprendre que ce qui m’intéressait vraiment était la conservation des espèces végétales et de leurs habitats. Et, conscient de mon niveau d’anglais déplorable, j’ai atterri en Hollande sur le campus international des sciences à Wageningen, pour suivre un Master en « Gestion et conservation des écosystèmes forestiers tropicaux ». Avec, toujours, l’intention de m’expatrier à nouveau. Diplôme en poche, j’ai pu repartir comme je le souhaitais en Afrique et en Asie. »
 

« Sauver le végétal… et le monde ! »
Pascal Truong partira également en mission humanitaire en République démocratique du Congo, « C’était mes jeunes années, j’avais des envies de sauver le végétal… et le monde ! La naïveté de la jeunesse ! Je suis partie une année avec une ONG “Première Urgence” sur un programme d’aide alimentaire et de relance agricole auprès de populations déplacées. En revenant, j’ai pu vraiment aller vers ce qui m’avait motivé à entreprendre des études. Je suis parti pour une coopération franco-namibienne avec pour mission d’accompagner le ministère namibien dans la décentralisation de ses aires protégées. L’idée était de confier la gestion des aires protégées aux communautés locales. Les accompagner dans une bonne gestion de leurs espaces naturels et de leurs ressources naturelles pour pouvoir en vivre. Moi j’intervenais surtout sur le volet flore : conservation des espèces végétales par une gestion durable permettant de générer des revenus au bénéfice des communautés locales. »

« Pas le Graal… mais presque ! »
Rentré à Paris, il repart pour La Réunion « travailler pour le Parc national de La Réunion où j’ai eu le privilège de coordonner le premier projet Life en Outre-mer. Il s’agissait notamment de sauver de l’extinction une forêt endémique, la forêt semi-xérophile (qui aime la sécheresse) réduite à peau de chagrin avec la colonisation de l’île par l’Homme et
désormais menacée par les espèces exotiques envahissantes. Pendant cinq ans d’abord, ce qui a permis d’acquérir les connaissances essentielles autour de la phénologie des espèces végétales qui composent ce milieu et d’évaluer l’état de conservation des dernières reliques d’habitats.

Puis, on a monté un second projet, pour compléter le précédent et remettre en connexion les zones relictuelles avec celles restaurées et reconstituées. Près de 200 000 jeunes arbres d’une soixantaine d’espèces semi-xérophiles auront été ainsi réintroduits sur une enveloppe de 80 hectares en six ans. Une phase professionnelle de ma vie dont je suis très fier. Je n’oublie pas, bien entendu, mes trois enfants qui ont eu la brillante idée de venir ponctuer ces treize années réunionnaises !

 

Pascal Truong ©A. Scalia
Pascal Truong ©A. Scalia



De retour en métropole en 2021, il prend en décembre 2022 la direction de la Réserve Naturelle Nationale de La Plaine des Maures. « Un sacré challenge car il y avait tout à reconstruire après l’incendie de 2021 et le désengagement du précédent gestionnaire. Les acteurs du territoire ne voulaient plus entendre parler de la réserve, il y avait un fort
enjeu de réconciliation, le besoin de consolider les budgets, de recruter une nouvelle équipe, de l’installer, et d’acquérir l‘ensemble du matériel nécessaire au bon fonctionnement.
Mon arrivée au Conservatoire botanique n’était pas prévue. Je ne cherchais pas à partir. Mais Marc Duncombe et Sylvia Lochon-Menseau, que j’apprécie beaucoup, m’ont fait un appel du pied. J’ai besoin d’avancer pour des personnes qui m’inspirent, ça m’a motivé à déposer ma candidature. L’autre motivation avec Port-Cros, c’est que je n’aurais jamais
pensé atteindre ce niveau de poste que j’imaginais réservé aux doctorants. Le Conservatoire botanique pour moi, ce n’était pas le Graal… mais presque ! Donc la reconnaissance des pairs et la possibilité donnée de pouvoir mettre au service de mon territoire ce que j’ai appris ailleurs… Tout ceci est vraiment gratifiant et j’ai hâte de démarrer cette nouvelle aventure végétale et humaine ! ».

E.P.


Source URL: https://www2.portcros-parcnational.fr/le-parc-national-de-port-cros/le-magazine-du-parc-national/ndeg34-printempsete-2024/bonus-le