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Scientific Reports 2013

Découvrez l'interview de Gilles Martin

Président du conseil scientifique du Parc national de Port-Cros

« Un regard vers l’avenir vigilant, préoccupé et néanmoins optimiste… »

Le 13 décembre 2023 au Forum Casino de Hyères, un grand colloque scientifique viendra clore cette année de célébration du 60e anniversaire du Parc national de Port-Cros. Comme un écho au colloque scientifique qui, en mai 1962, en avait validé la création (Voir article page 6)
Président du conseil scientifique du Parc national, Gilles Martin a répondu aux questions de L’Attitude Mer, Terre et Littoral (LAM) sur cet évènement, ses objectifs, son organisation et ses perspectives.

Dans quel optique et quel état d’esprit est organisé ce colloque « anniversaire ? »

« En qualité de président du conseil scientifique, et compte tenu du rôle de la science dans le fonctionnement et la gouvernance du Parc national, il n’était pas imaginable que l’anniversaire des 60 ans ne soit pas marqué aussi par un événement à caractère scientifique. C’est cela l’esprit essentiel de cette initiative : marquer l’importance de la science. Le colloque s’appelle d’ailleurs « 60 années d’apport scientifique au service d’un territoire protégé - L’expérience du Parc national de Port-Cros ».
« La science a été présente dès le début dans l’histoire du Parc national. D’abord de façon assez sommaire, puis de façon institutionnelle avec la création du conseil scientifique, inscrite dans le décret de création. Ce conseil scientifique a ensuite pris de l’importance. En premier lieu, parce que la loi a prévu qu’il devait être consulté de manière obligatoire ; puis les directions successives ont voulu lui donner de l’importance en le consultant très régulièrement sur les choix qu’elles avaient à faire en matière de gestion des milieux. Elles avaient besoin d’avoir l’avis de spécialistes de sciences exactes ou de sciences sociales pour prendre leurs décisions. »

La place de l’homme dans la nature : « Une idée perçue très tôt »

« Très vite, après la création du Parc national, le conseil scientifique s’est enrichi de trois éléments constitutifs : le groupe “Mer’, le groupe “Terre” et le groupe “Sciences humaines et sociales”. Ce groupe “Sciences humaines et sociales”, on l’a vu petit à petit monter en puissance au sein du conseil parce que l’on s’est évidemment rendu compte que les décisions à prendre devaient tenir compte, aussi bien des aspects strictement scientifiques, que des aspects sociaux. Car c’est un territoire où des humains vivent et où il y a des problèmes qui relèvent du domaine social. Cette prise de conscience est antérieure à la réforme des parcs de 2006. Quand je suis entré au conseil scientifique en 1992 à la demande d’Emmanuel Lopez en tant que juriste, il y avait un sociologue et un historien… Cette idée qu’il fallait mélanger sciences sociales et sciences exactes a donc été perçue très tôt. »

Comment l’organisation de ce colloque a-t-elle été pensée ? Est-ce l’occasion de regarder en arrière ce qui a été fait et de se projeter vers l’avenir ?

« Oui, c’est exactement cela. Il y a quatre moments dans ce colloque. Le premier temps, c’est une introduction historique à plusieurs voix. On commence par le plus général : d’où vient le Parc national de Port-Cros, les idées initiales, la mise en place, puis la place de la science et du conseil scientifique dans la gouvernance du Parc national, et enfin les apports de la recherche scientifique dans les choix de gestion avec des résultats vérifiables soixante ans plus tard. Donc c’est le premier temps : on regarde vers le passé.
Deuxième temps : c’est la stratégie du Parc national pour les dix ans à venir qui vient d’être adoptée par le conseil d’administration. Il s’agit de la présenter et d’avoir le regard extérieur de scientifiques, mais aussi d’acteurs de terrain, comme des pêcheurs sur ces orientations. »
« Les troisième et quatrième temps se rapportent à l’étude de problèmes transversaux qui illustrent justement quel est le rôle de la science au sein du Parc. Le troisième temps sera ainsi consacré au défi de la fréquentation dans un espace naturel protégé, avec le rappel de toutes les études qui ont été faites, et les retours d’expérience.
Enfin, le quatrième temps traitera d’une actualité forte : la question de la conservation de la biodiversité face aux changements globaux… Quel est leur impact, en particulier le changement climatique, sur la biodiversité terrestre et marine, les espèces, etc.
L’histoire, l’avenir et le regard, donc, sur deux défis ponctuels. »

Regards croisés sur 60 ans de protection

Qui sont les participants ?

« On a souhaité que des agents du Parc national et des acteurs du territoire soient présents au côté des membre du conseil scientifique, du Conservatoire botanique national méditerranéen de Porquerolles et de scientifiques venant de l’extérieur : de la commission scientifique de l’OFB, de l’Office de l’environnement de la Corse, du Conservatoire d’espaces naturels Paca, des universités de Toulon, d’Aix-Marseille, de la Côte d’Azur, de Montpellier ; le GIS posidonie, etc.
Je précise que nous allons alterner des interventions courtes d’environ dix minutes, et des tables-rondes, car on souhaite qu’il puisse y avoir un échange avec la salle. Ce colloque est d’ailleurs ouvert à tous sur inscription (1). Le texte complet des interventions du colloque fera l’objet de publications. »

La journée du lendemain sera elle-aussi tournée vers la science ?

« Oui, le 14 décembre, jour anniversaire de la création du Parc national de Port-Cros, le conseil scientifique se réunira en séance pleinière en matinée.
Puis, à 15 heures, s’ouvrira - ndlr : toujours au Forum Casino de Hyères - une rencontre baptisée « 60 ans et après ? » présidée par le maire de Hyères et président de la métropole, Jean-Pierre Giran. En première partie est prévue la projection du film « Le Miracle de Port-Cros » (2).
Elle sera suivie d’une rencontre pour laquelle nous avons fait appel à des décideurs ou d’anciens décideurs qui ont beaucoup travaillé sur les questions des parcs nationaux et espaces protégés et de faire se croiser leurs regards sur 60 ans de protection. Nous avons pour cela invité deux anciens ministres de l’Environnement : Michel Barnier et Corinne Lepage, Jérôme Bignon, président du groupe de travail du Sénat sur le climat et l’environnement et Guillaume Santeny, président du Plan Bleu (3) pour l’Environnement et le développement en Méditerranée et ancien administrateur du Parc national. »

« Se souvenir, rappeler et se battre pour continuer ! »

« Ces journées de clôture sont l’occasion de rappeler et de se souvenir que depuis soixante ans le territoire du Parc national a servi de support à des recherches scientifiques. Que ces recherches ont fait progresser la connaissance et ont aidé à la gestion. Elles ont été diffusées et conservées par la publication tous les ans des Scientific Reports qui participent à la renommée nationale et internationale du Parc national. Nous sommes désormais le seul parc à avoir une revue scientifique en France, et elle est diffusée en français et en anglais. L’occasion de dire que cet enrichissement mutuel du Parc pour la recherche scientifique et de la recherche scientifique pour le Parc doit se poursuivre, et évidemment, cela suppose que l’on s‘interroge sur les moyens financiers et humains pour relever ces défis. »

Quel regard le conseil scientifique porte-t-il sur l‘avenir ?

« Un regard préocuppé, vigilant et néanmoins optimiste. Préoccupé, parce qu’il se passe des choses que l’on ne peut pas négliger : le changement climatique, l’érosion de la biodiversité… Vigilant parce qu’il faut suivre avec attention ce qui se passe dans notre territoire et cela appelle des analyses, des études, des observations… Et optimiste, néanmoins, parce ce que le Parc national a surmonté bien des événements dans le passé, qu’il est capable d’en surmonter d’autres ; qu’il a eu de grandes réussites et que sa nouvelle stratégie scientifique est très en pointe… Donc tout cela me rend optimiste, dans la mesure où je pense que l’on arrivera à surmonter les difficultés qui sont bien réelles, mais qui ne doivent pas nous plonger dans la morosité et se dire que tout est foutu… parce que cela ne sert à rien ! Le Parc national a les moyens intellectuels de le faire, et pour ce qui est des moyens et des ressources financières, il va falloir se battre pour les obtenir ! »

Emmanuelle POUQUET


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